Tuesday, 11 August 2015

Les Jesus video



Les jeux vidéo font l’objet d’attentions toujours plus nombreuses de la part du grand public, des médias, des universitaires ou du monde de l’entreprise. Les géographes seraient-ils déjà distancés par rapport aux autres disciplines des Sciences Humaines et Sociales ? Un rapide tour d’horizon sur la bibliographie francophone montre la rareté des travaux en géographie par rapport à ceux issus de la sociologie, de la psychologie ou des sciences de l’information et de la communication.
Un article de Samuel Rufat et Hovig Ter Minassian, paru en 2008 dans Cybergéo, Revue Européenne de Géographie contribue à combler cette lacune (http://www.cybergeo.eu/index17502.html). Prenant l’exemple des jeux, Sim City et Civilization, les auteurs constatent qu’il n’existe pratiquement pas de jeux vidéo sans création d’un espace, d’une route qui défile, d’un globe terrestre ou d’un univers imaginaire.
Parfois utilisés à des fins pédagogiques, les jeux vidéo sont des modélisations de la réalité, en partie appropriables et modifiables par le joueur, mais comme tout modèle, ils ne sont pas neutres. Il est dès lors possible de décrypter les représentations spatiales à la fois des concepteurs et des joueurs de jeu vidéo. L’intérêt pour le géographe est là multiple : le jeu vidéo permet de repenser l’articulation entre le réel et le virtuel, il peut être un outil de modélisation, il donne à lire les idéologies et les représentations spatiales qu’il véhicule.
Par la suite, une équipe de jeunes chercheurs issus de différentes disciplines, s’est constituée pour fonder le laboratoire junior « Jeux Vidéo : Pratiques, Contenus, Discours », rattaché à l’ENS Lettres et Sciences Humaines de Lyon. Les ambitions sont triples : recenser les travaux sur les jeux vidéo en France, structurer un réseau de chercheurs et de jeunes chercheurs, organiser des séminaires bimensuels et une journée d’étude par an dans le but de faire dialoguer entre eux chercheurs, didacticiens, enseignants et professionnels du jeu vidéo.
Le projet scientifique, au sein duquel les géographes ont toute leur place, se veut résolument pluridisciplinaire et transversal. Il vise à légitimer les jeux vidéo comme objet d’étude en Sciences Humaines et Sociales et est structuré par cinq grandes approches :
  • examiner les liens entre jeux vidéo, espace virtuel et territoire, en cherchant à savoir si les pratiques des uns peuvent influencer les pratiques des autres,
  • aborder le contenu des jeux en termes de représentations,
  • se pencher sur les mécanismes de ces jeux, qui déploient la modélisation dans toutes ses dimensions, à la fois rhétorique (textes), mathématique (algorithmes, équations) et iconique (dessins, animations),
  • analyser l’emploi des jeux vidéo pour la formation et l’enseignement tant au regard de leurs conditions de production que de leur contenu, en cherchant à peser leurs apports comme leurs limites,
  • saisir les pratiques concrètes pour comprendre les savoirs et les savoir-faire mobilisés par les joueurs, les processus de socialisation et le rapport du joueur à des jeux dont les concepteurs vantent la croissante modularité.
Le premier séminaire portera sur les rapports entre jeux vidéo et espace, industrie vidéoludique et territoire. De plus amples informations sont disponibles sur le site : http://jeuxvideo.ens-lsh.fr/.

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